Sarah et Driss n'ont rien pour se rencontrer et tomber amoureux l'un de l'autre. Sarah est une jeune lycéenne...

Sarah et Driss n'ont rien pour se rencontrer et tomber amoureux l'un de l'autre. Sarah est une jeune lycéenne française qui vit avec sa mère aux portes d'un bidonville. Les deux femmes ont suivi un homme avec qui la plus âgée des deux devait ouvrir un commerce. Mais il est parti avec l'argent, laissant les deux femmes démunies.

Driss, lui, appartient à la meilleure société marocaine. Son père est un industriel qui fabrique des jeans. Il est issu d’une famille fassie et vit à Casablanca dans le très chic quartier d'Anfa, tout en villas, jardins et vues sur le grand large... L’histoire d'un amour impossible dans le Maroc du siècle dernier.

« Tout le monde est enfermé au Maroc, même les plus chanceux. Driss porte le poids des traditions familiales qu’il ne doit pas trahir, des normes de son milieu, des chaînes de la masculinité toxique – réussir à faire de l’argent, être un homme. Il y a une grande inertie dans cette classe aisée : elle ne veut rien changer pour ne pas risquer de perdre ses privilèges. Driss n’accepte pas cet ordre social. » Afrique Magazine (Février 2021) Peut-il y avoir un vrai amour désintéressé entre Driss et Sarah, dans le Casablanca des années 1990 ? À première vue cela sent le déjà lu à plein nez. Si, dans « Aussi riche que le roi » Abigail Assor mobilise tous les archétypes, c'est pour leur donner une nouvelle vie.

Si ce roman (208 pages), publié en janvier 2021 chez Gallimard, est centré sur l'histoire de ce couple, il ne s'y réduit pas. Ils font partie d'une bande de copains nés du bon côté de la barrière, qui passent leur temps entre la plage, les soirées privées et les boîtes de nuit… « Abigail Assor dit la brutalité des rapports sociaux au Maroc à travers le regard d’une adolescente déclassée. Elle décrit, avec un sens particulièrement acéré du détail et une neutralité de ton qui amplifie encore la brutalité des situations, les signes extérieurs de distinction des uns et l’infinie pauvreté des autres. » Violaine Morin, Le Monde des Livres.Et puis il y a le style de cette primoromancière, à la fois chirurgical, maniant un scalpel précis et nerveux, et contenant ce qu'il faut de lyrisme pour raconter des amours difficiles, improbables.

« (…) Tu crois que t'es mieux que nous, Lalla Sarah, parce que tu traînes avec les riches ? » Il la lui ressortait tout le temps, cette histoire de riches. Ça le faisait rire de l'appeler Lalla, parce que c'était un titre de noblesse et qu'il pensait qu'elle se prenait pour une reine. Mais un jour, elle le savait, on l'appellerait vraiment Lalla, et le petit Arabe, il serait toujours dans son bidonville. « Bien sûr que je suis mieux que vous. Je suis une Française, moi. On n'est pas de la même race, connard. » (Page 11).

Abigail Assor excelle aussi à raconter le vrai pouvoir de l'argent, qui n'a rien à voir avec les marques de (faux) luxe ou un mode de vie bling bling. « Tant que dans le portefeuille de Driss, il y aurait des billets, ces billets inépuisables d'aussi riche que le roi, alors chez lui, chez elle, ce serait le vrai calme : la fin de l'injustice, de la domination, de la violence ; le calme d'une maison où on a tous les droits ». Après des études de sociologie et de philosophie à Londres, l’autrice née en 1990 à Casablanca a travaillé dans la communication culturelle et l’art contemporain, avant de se consacrer à l’écriture.

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