Il est incontestable que le Maroc a gagné un excellent ministre de la Santé autour duquel il convient de capitaliser...

Il est incontestable que le Maroc a gagné un excellent ministre de la Santé autour duquel il convient de capitaliser pour reconstruire une nouvelle vision pour ce secteur vital ...

Regard serein, démarche assurée, Khalid Aït Taleb, 55 ans, n’a pas eu la tâche facile. Pas de répit pour lui,  les attaques perfides, qui viennent souvent de l’intérieur, voire des proches,  ont commencé par presse interposée dès le lendemain de sa nomination en 2019.

Des articles, sentant la commande, fleurissent comme par magie sur les colonnes d’une certaine presse. Tous tendent vers un seul objectif: discréditer le nouveau ministre en le déstabilisant. Ce qui ressemble fort bien à une Kabale, orchestrée par des milieux  médicaux aux intérêts antagonistes souvent de mèche avec des fonctionnaires du ministère, s’est poursuivie de plus belle, redoublant même d’intensité, en plein crise sanitaire, particulièrement sur le sujet sensible des marchés publics liés  à l’acquisition des équipements du Covid-19. Certains supports électroniques ont accusé le ministère d’avoir surfacturé les kits de dépistage sous couvert d’« enquêtes », inspirés en réalité par les soumissionnaires frustrés qui n’ont pas obtenu le marché convoité.    

Or, l’arrivée du  Covid-19 au Maroc a servi de baptême de feu pour ce ministre sans étiquette politique, inconnu jusqu’ici au bataillon, lui permettant de prendre de l’épaisseur dans un contexte de crise sans précédent. « Que le titulaire du portefeuille soit un technocrate issu du secteur a été certainement une grande chance pour le pays », indique un clinicien de Casablanca. La nomination de M. Aït Taleb marque une rupture nette avec la tradition de ministres issus des partis politiques dont les noms sont associés plus à des scandales d’argent qu’à des actions bénéfiques pour la santé au Maroc qui continue, elle, à souffrir de mille maux. Le mandat le plus spectaculaire à cet égard étant celui du PPS Lahoucine Louardi qui, sous ses dehors de docteur désintéressé, n’a pas résisté à l’envie de mettre le doigt dans le pot de confiture des deniers publics (Voir le Canard Libéré N° 454 : radioscopie  d’un scandale à 100 milliards). Anas Doukkali, successeur de M. Louardi, limogé avec une brochette de collègues en octobre 2017 suite au fameux scandale  d’El Hoceïma, n’aura été qu’une petite parenthèse vite refermée après la décision du PPS de quitter le gouvernement Al Othmani.

À tout point de vue, Khalid Aït Taleb aura été la surprise du remaniement ministériel d’octobre 2019. Secrétaire général du ministère par intérim en remplacement de Hicham Nejmi qui a eu maille à partir avec la justice suite à un fait divers scabreux dans un hôtel à Agadir alors qu’il était pressenti pour en prendre les rênes après le départ de M. Doukkali, M. Aït Taleb  bénéficiera alors d’une promotion pour le moins inattendue. Heureux concours de circonstance, le nouveau ministre de la Santé ce sera lui. Et pas un autre. C’est une bonne pioche dans un contexte où les erreurs de casting sont légion.

La consécration est d’autant plus belle que  Khalid Aït Taleb est un pur produit de l’école marocaine que l’arabisation a passée à la tronçonneuse. Diplômé de la faculté de médecine de Rabat, il n’est pas parti à l’étranger, comme cela est courant dans la profession, pour parfaire sa formation universitaire. Ce qui confère un surcroit de distinction à son parcours dans un univers où faire un détour dans une université française ou un hôpital parisien est un plus décisif pour la carrière de médecin du cru qui veut exercer dans son pays natal.

Homme discret, M. Aït Taleb n’est pas un homme communicatif. C’est son talent d'Achille.

Ce chirurgien de formation, originaire d’Agadir, qui a fait ses preuves dans l’ombre, sans tambour ni trompettes n’avait pas besoin de l’imprimatur de l’étranger pour s’imposer et être reconnu. Son premier grand poste ? Prendre les commandes du CHU de Fès depuis son inauguration en janvier 2009 par S.M. Le Roi Mohammed VI et diriger son service de chirurgie viscérale jusqu’à juin 2018. En l’espace de quelques années, M. Aït Taleb, élu président de l’Alliance des CHU du Maroc en 2016  et membre du comité d’experts au sein du ministère de la Santé, a réussi à faire de ce centre hospitalier universitaire nouvelle génération, qui a permis de régler l’insuffisance des soins dans la région Fès-Boulemane, Meknès-Tafilalet et Taza-Al Hoceïma Taounate),  un  fleuron de la médecine au Maroc et un pôle d’excellence pour la formation des jeunes médecins.

«M. Aït Taleb fournit un travail de fourmi, infatigable à la tâche, consciencieux et rigoureux qui ne court pas derrières les éloges », dit de lui un professionnel du secteur privé qui l’a côtoyé.  

Faite et ne sera jamais défaite, sa  réputation de bon technicien de la santé s’est vérifiée dans ses choix thérapeutiques clairs et résolus pour affronter la pandémie du Covid-19. À cet égard, la circulaire datée du 23 mars qu’il a adressée aux établissements hospitaliers nationaux, leur recommandant d’utiliser la Chloroquine pour traiter les malades du coronavirus s’est avérée judicieuse.  Vivement décriée en France pour des raisons obscures, cette molécule a permis de sauver beaucoup de vies humaines au Maroc et on le doit sans conteste à l’esprit d’anticipation de M. Aït Taleb qui n’a pas été influencé  par la polémique douteuse  autour de la Chloroquine, montrant par la même occasion son indépendance en tant que ministre par rapport au lobby du médicament dont le virus  a révélé au grand jour le jeu trouble sur fond  de conflit d’intérêts liés à de gros enjeux d’argent. Droit dans ses bottes, sûr de son fait,  M. Aït Taleb maintiendra ce protocole même lorsque l’OMS, sur la base de la fameuse et fumeuse étude sur la nocivité de la Chloroquine, décida de suspendre les essais  cliniques sur l’hydroxychloroquine  avant de se rétracter une semaine plus tard…    

Homme discret, M. Aït Taleb n’est pas un homme communicatif. C’est son talent d’Achille.  Il fuit même les sunlights pendant que d’autres courent derrière les feux de  la rampe sans aucune réussite à leur actif. «Il ne sait pas vendre ses actions», reconnaît un membre de son entourage.  Ce qui lui joue parfois des tours dans un ministère gangréné par la corruption et  dont il n’a pas la haute mains vu que la majorité des responsables et des directions, héritées des époques précédentes,  échappent à son contrôle. « M. Aït Taleb fera davantage du bon travail s’il prend le temps de mettre en place son équipe de travail et anesthésier les forces obscures qui s’ingénient au sein du ministère à lui mettre les bâtons dans les roues », croit savoir un grand professeur du public.  

Khalid Aït Taleb a l’avantage de l’agilité et de l’efficacité opérationnelles que certains de ses collègues au gouvernement, plombés par des petits calculs partisans, sont loin de posséder. Un atout d’importance qu’il s’agit de mettre à contribution pour reconstruire une nouvelle vision pour la santé au Maroc. Celle-ci passe sans doute par la mise en  place d’une agence de la Santé dont la partie soins à la population sera gérée par des professionnels et des techniciens. L’avantage d’une telle structure, qui pourrait  cohabiter avec le ministère de tutelle, réside dans sa capacité à survivre aux changements de majorités politiques, ce qui lui permettrait d’exécuter sur le terrain dans la stabilité et la durée une politique de la santé ambitieuse préalablement définie.

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