Dans le Maroc graduellement déconfiné où l’intendance sanitaire doit absolument suivre, se soigner du Covid-19...

Dans le Maroc graduellement déconfiné où l’intendance sanitaire doit absolument suivre, se soigner du Covid-19 devrait être une routine médicale qui cohabiterait avec une vie économique et sociale sous contrôle. Pas d'autre choix que de gérer ce grand casse-tête...  

Mobilisés à fond depuis le début de l’épidémie, le ministère de la Santé et ses équipes sur le terrain sont, avec les forces de l’ordre,  les nouveaux soldats d’une guerre hors normes où l’assaillant est complexe, invisible et insaisissable.

Pour la gagner, il est indispensable de doter ce département des moyens nécessaires en lui allouant les armes et les minutions nécessaires, en l’occurrence des ressources financières supplémentaires à la hauteur de la gravité de la situation sanitaire traversée par le pays. Acquisition des équipements médicaux indispensables, motivation du personnel soignant, déploiement de nouvelles unités de soins…

Parent pauvre des politiques publiques du Maroc d’avant, 18,67 milliards de DH soit 7,27 du budget total du pays,  la Santé est objectivement fondée à devenir dans l’immédiat un superministère compte tenu de son rôle décisif aussi bien dans la mise en place des mesures prophylactiques que la prise en charge sanitaire des malades.

Devant la nouvelle flambée ces derniers jours de la courbe des contaminations que l’on croyait un moment stabilisée (la barre des 6.000 cas confirmés a été dépassée dimanche 10 mai), le ministre de tutelle est allé à contre-courant en annonçant que le pays n’est pas prêt pour le déconfinement programmé officiellement le 20 mai.

Criminalisation

Mais est-ce une bonne solution que de retenir encore les Marocains chez eux, sachant qu’un enfermement de deux mois est censé avoir porté ses fruits ? En plus, il n’est pas sûr que la prolongation du confinement fléchisse la courbe des infections dans un pays où la réalité sociale, dopée à l’ignorance et à l’inconscience, est porteuse de toutes les incertitudes. Exemple fâcheux parmi tant d’autres, celui de cette dame de Marrakech qui a créé un cluster en accueillant dans son hammam domestique ses voisines du quartier!  Vouloir lutter contre des événements aussi imprévisibles est purement illusoire. C’est mission est impossible, même en faisant surveiller chaque citoyen par un policier pour qu’il contrôle jour et nuit ses faits et gestes ainsi que ses déplacements.

Moralité : il faut faire avec sa réalité locale et penser peut-être à criminaliser les comportements irresponsables comme celui de Molat Al Hammam pour pousser les gens à ne pas prendre les choses à la légère. Et puis, les gens, surtout les bataillons des précaires de l’informel inconnus des statistiques officielles   qui vivent au jour le jour, sont obligés de sortir dehors pour chercher leur pitance quotidienne.

Le grand défi est moins de repousser la date du déconfinement que d’organiser une sortie du confinement progressive, intelligente et encadrée en fonction des indicateurs de la maladie dans tel ou tel zone urbaine. Dans cette optique, le département dirigé par Khalid Ait Taleb représente, sans nul doute, le dispositif-clé et stratégique sur lequel repose la réussite de la sortie graduelle de crise qui conditionne à son tour un retour bien maitrisé à la vie normale.

Pendant que les Marocains reprendront le chemin du travail et que certains commerces rouvriront leurs portes dans le respect des mesures de protection qui s’imposent, le ministère de la Santé est condamné à poursuivre ses efforts en les intensifiant encore plus, notamment via les tests de dépistage dont il faut augmenter la cadence, pour espérer contenir la progression de l’épidémie. Comme le virus continuera à circuler et compte tenu que le risque zéro n’existe pas, il est évident que le pays continuera à enregistrer de nouveaux cas de contamination essentiellement dans les régions à fort dynamisme économique et à forte concentration de la population. Pas d’autre choix donc que de cohabiter avec cette nouvelle maladie qu’est le Covid-19 de façon à ce qu’elle soit intégrée dans les habitudes. La planète ne s’est pas arrêtée de tourner avant que le coronavirus ne vienne la mettre sens dessus dessous alors que plusieurs millions de personnes meurent chaque jour de maladies et de fléaux divers (cancer, diabète, AVC, grippe saisonnière, accidents de la route, famine, guerres …). Le coronavirus ne doit pas non plus empêcher les hommes de vaquer de nouveau à leurs occupations. Sauf que la reprise se fera avec des restrictions et des contraintes comme en période de guerre. La liberté du jour d’avant ne reviendra pas tant qu’un traitement efficace n’aura pas été trouvé.

Responsabilisation

En attendant, l’intendance sanitaire doit suivre et se soigner du Covid-19 deviendra une routine médicale parallèlement aux autres tâches de la vie quotidienne en relation avec la vie sociale et économique. Sauf que celle-ci sera désormais sous contrôle, sous la supervision des pouvoirs publics, et avec le moins de dégâts possible, sachant que d’un retour à la normale maîtrisé dépendra la maîtrise de la pandémie.  Relâcher la surveillance c’est prendre le risque d’un rebond qui provoquerait le débordement des hôpitaux.  

Si la responsabilisation de chacun est indispensable pour combattre la maladie, la sanction des manquements aux règles des protocoles sanitaires en milieu professionnel doit également être envisageable. Dans ce domaine, les usines,  qui ont montré leur fort potentiel de contagion et de propagation du virus,  sont à surveiller comme le lait sur le feu tout comme les souks et autres marchés de gros à Casablanca où la promiscuité sans moyens de protection fait des ravages. C’est dire que le confinement est plus facile que le déconfinement puisqu’il s’agit de consolider les acquis réalisés pendant la période de la quarantaine en continuant à faire baisser le RO, actuellement sensiblement au-dessus de 1. Une réduction de ce taux dit de «taux de reproduction de base » mesure la moyenne de gens qu'une personne infectée du Covid-19 va à son tour contaminer. Un chiffre inférieur à 1 signifie que le nombre d'infections dans le pays tend à la baisse, alors qu'un niveau supérieur suggère une tendance à la hausse. Dit autrement, il faut que la stratégie de déconfinement nationale soit rigoureusement accompagnée sur le terrain pour que le déconfinement, opéré la peur au ventre par plusieurs pays étrangers, ne soit pas un saut dans l'inconnu.

Encadré

La grande traque

Dans le dispositif de lutte contre le Covid-19, le dépistage PCR (Polymerase chain reaction) est une pièce maîtresse, voire une arme décisive.  Les pays qui ont su déployer à temps cette arme à grande échelle ont réussi contenir la maladie. Il s’agit particulièrement de l’Allemagne dont la capacité de dépistage s’élève à 500.000 tests par jour, soit quatre fois plus que la France où la Covid-19 a fait beaucoup plus de morts que dans le pays de Merkel. Et pour cause. Dès début février, les Allemands, qui se sont appuyés sur les informations communiquées par les Chinois sur le nouveau coronavirus, commencent à mettre en place leur stratégie prophylactique de masse qui marche sur deux pieds: tester et isoler. S’inspirant du modèle sud-coréen qui a fait ses preuves dans la lutte contre ce fléau, le plan germanique vise un triple objectif : éviter que les porteurs du virus n’infectent d'autres personnes; permettre une prise en charge thérapeutique précoce pour prévenir d'éventuelles complications et éviter un débordement des unités de soins ; mieux comprendre la maladie et son mode opératoire pour adapter la riposte sanitaire à apporter sur le long germe.

Le Maroc, qui a plusieurs trains de retard dans le domaine du dépistage, est monté petit à petit en charge. De quelques centaines de tests par jour au début du mois de mars, la capacité du Maroc est passée depuis le 23 avril à un peu plus de 2.000 tests par jour. L’objectif est d’arriver après le déconfinement à faire quelque 70.000 tests par semaine. Relever ce défi passe par l'implication des laboratoires privées dans le travail de dépistage qui se milite aujourd’hui à   l’Institut Pasteur de Casablanca, l’Institut national d’hygiène et l’hôpital militaire Mohammed V de Rabat, les six centres hospitaliers universitaires (CHU) du pays, l’hôpital régional d’Agadir, l’hôpital militaire de Meknès ainsi que deux cliniques à Casablanca. Le ministère de la Santé est en train de travailler sur les modalités d’autorisation des laboratoires privées pour contribuer à l’effort national de dépistage. Ce travail de dépistage doit s’appuyer au préalable sur des « brigades sanitaires » chargées dans chaque région de suivre les personnes contaminées au coronavirus et traquer sur le terrain les individus ayant été en contact avec elles. Un boulot titanesque dont le mot d’ordre est:  Ne laisser personne passer à travers les mailles du filet. Dans ce cadre, l’application de traçage numérique, qui a obtenu récemment le feu de la CNDP pour son déploiement,  est censée venir en renfort de cette entreprise de renseignement humaine où le Maroc possède une expérience connue et reconnue.      

Les individus testés positifs seront invités à s’isoler chez eux ou dans un lieu mis à leur disposition par les autorités. Épargner au pays une seconde vague aux conséquences fâcheuses est à ce prix.

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