Le Covid sort-il de la plage ?

Les vagues se succèdent les unes après les autres...

Dans la stratégie gouvernementale antivirus, pas le moindre symptôme d’une quelconque poussée d’amateurisme ou d’incohérence comme certains esprits, se voulant très cartésiens, sont fortement tentés de le penser.

Dans les plages de Casablanca, tout est permis, jouer au foot, faire du footing, promener son chien…Sauf l’essentiel, piquer une tête ! En ces temps printaniers, avouez que c’est frustrant et incongru à la fois. Pourquoi se baigner est-il interdit ? Pas d’explication. Mais ainsi en ont décidé les autorités anti-corona qui, visiblement, en savent beaucoup plus que le commun des mortels sur ce mystérieux virus. L’ex-coronavirus doit sortir des tréfonds de l’Atlantique qu’il contamine, voyage dans les airs avant d’amorcer doucement sa descente sur la terre ferme vers le coup de 20 heures. Malheur à celui qui traîne encore dans la rue à cette heure précise. Impitoyable et invisible, le virus s’abattrait sur lui comme un drone avant de l’expédier fissa vers les urgences. C’est ce qui explique certainement l’obligation décrétée par les têtes pensantes et « anticipantes » du comité scientifique de baisser le rideau à cette heure pour tous les commerces. C’est pour protéger la population contre la contagion, « éviter le pire » et « sauver des âmes» comme dirait le grand Saad Eddine Al Othmani qui a appris à parler le corona language.

Admirez la précision de l’heure du couvre-feu !  20 heures ! Et non 21 ou 22 heures !  Détrompez-vous, ce sens de l’exactitude devrait être le résultat d’études scientifiques très poussées que les citoyens lambda que nous sommes devenus depuis mars de l’année dernière ne pourraient pas comprendre. Dans la stratégie gouvernementale anti-covid, pas le moindre symptôme d’une quelconque poussée d’amateurisme ou d’improvisation comme certains esprits, se voulant très cartésiens, sont fortement tentés de le penser. Elles sont bien étudiées les différentes mesures de restrictions comme la fermeture des salles de sport et des hammams pendant plusieurs mois, puis l’autorisation du public de s’y rendre à nouveau et la condamnation prolongée de l’écosystème des traiteurs et du secteur de l’événementiel.

Si à partir de 20 heures, il faut mettre fin à son activité, c’est quartier libre en journée. Sans restriction aucune. Dans des lieux archipleins où les gestes barrières et autres mesures de protection sont très peu observés: souks, supermarchés, tram, bus et autres endroits clos. À croire que corona diurne est inoffensif et bienveillant contrairement à son collègue nocturne qui serait, lui, très méchant et contagieux. Doté de redoutables services de renseignements incarnés par le réseau des mokadems et des chioukhs que le monde entier nous envie, le ministère de l’Intérieur doit  disposer d’informations de première main sur le fonctionnement du Covid, la façon dont il se transmet, les endroits qu’il aime fréquenter ou bouder…

À l’occasion du mois de Ramadan, période du recueillement et des rencontres en familles par excellence, riche de son atmosphère sociale et spirituelle particulière, c’est le confinement domestique pour tous dès la tombée de la nuit. Interdiction des prières collectives de Al Ichaa, tarawaih et Assobh en mosquée.

Impossible de se hasarder dehors – le couvre-feu court entre 20 heures et 6 heures du matin – pour se dégourdir les jambes et  avec chebbakia, mlaoui et autres briouates. Sans prendre le risque de tomber nez à nez avec les hommes en uniforme qui dressent des barrages à chaque carrefour. Le confinement nocturne est justifié par le désir d’anticipation, comme l’a expliqué le Premier ministre lundi 12 avril sous la coupole, d’une troisième vague éventuelle charriant le variant anglais dont les signes inquiétants ne sont toujours pas là.

C’est magnifique et rassurant un exécutif, qui agit au lieu de réagir, anticipe au lieu de subir, prévient au lieu de guérir !  

Quid des autres problèmes tout aussi graves qui minent le pays en le plombant ?  Cette vision anticipatrice est-elle seulement compatible avec la crise sanitaire ?  Le caractère très contagieux et mortel de la souche du pays d’Élisabeth, qui a fait des ravages en Europe et dont 115  cas ont été détectés officiellement au Maroc jusqu’au 9 avril 2021, est démenti jusqu’à présent par le comportement global des indicateurs épidémiologiques. Ces derniers n’ont pas enregistré d’emballement notable qui ferait craindre le pire. Celui-ci ne saurait évidemment se produire dans la grande affluence et la promiscuité du jour. Le danger guette et menace à la tombée de la nuit. Soyons donc de bons et gentils confinés du ftour au shour !