Abdellah Chankou
24.11.2021 23:10

Devant la pléthore des jours fériés au Maroc et leur enchaînement plus que de raison, il y a de quoi se perdre au point de ne pas savoir quelle « bonne fête» souhaiter les uns aux autres. Dans ce domaine, il faut dire que nous faisons partie des nations les plus dynamiques de la planète : 6 fêtes religieuses et 11 civiles à l’année !  Soit 18 au total contre 11 en France, 14 en Espagne, 9 en Allemagne et 10 aux États-Unis.  Un joli record qui mérite de figurer dans le Guinness. Si on ajoute le ramadan, mois qui met tout le pays en mode somnolence pour ne pas dire pause, le Royaume aura davantage sa place dans un classement des pays les moins productifs. La question qui se pose d’emblée est celle-ci : ces jours de commémoration sont-ils tous si importants dans la vie de la nation qu’il faille absolument les fêter en chômant? Faut-il qu’un jour férié soit obligatoirement chômé ? En dehors de quelques fêtes religieuses et quelques dates à caractère civil,  dotées d’une forte charge symbolique qu’il serait difficile de supprimer comme la Fête de l’indépendance, du Trône ou  de l’Aïd Al Fitr, le reste du calendrier des fêtes commémorant notamment certaines dates gagnerait à être réformé…

Dans un pays qui adore les fêtes, les ponts et les doubles ponts, qui ne travaille déjà pas assez et où la productivité du travail reste faible, réduire le nombre de jours fériés à l’année ne serait pas a priori une mauvaise idée, même si l’impact économique d’une telle mesure ne peut être évalué que dans le cadre d’une enquête scientifique secteur par secteur. Sans préjuger des résultats d’une telle étude, il est incontestable que ce trop-plein de fêtes a ceci de pénalisant qu’il casse la dynamique économique, provoquant un manque à gagner énorme pour les entreprises. Pour les chaînes de production des usines en particulier, le préjudice en termes d’exploitation, provoqué par l’arrêt de l’activité à cause des jours fériés, doit être considérable. Relancer les machines après un arrêt d’une journée ou deux surtout en milieu de semaine, réputé plus productif en plus d’être fastidieux, est synonyme de grosses pertes.

Pays réputé pour ses valeurs de solidarité et d’entraide, le Maroc pourrait toutefois faire travailler la population active pendant un jour férié à déterminer en vue de financer un chantier social jugé essentiel.

Mais la population, elle, n’en a cure. Pour cette dernière, un jour férié est considéré d’autant plus comme une aubaine que le travail et l’effort ne sont pas vraiment la valeur la mieux partagée, ce qui va à l’encontre de cette obligation de mettre le pays au boulot pour gagner les points de PIB qui lui manquent cruellement pour déclencher un cercle de croissance vertueux.  

En effet, rien ne fait aujourd’hui plaisir au Marocain en général que d’arrêter de travailler pour cause de fête ! Nombre de citoyens sont particulièrement aux anges lorsqu’ils apprennent que la fête tombe un mercredi ou un jeudi pour s’offrir un double pont, comme ce fut le cas récemment avec la fête de l’indépendance ou l’anniversaire du Prophète. Pays réputé pour ses valeurs de solidarité et d’entraide, le Maroc pourrait toutefois faire travailler la population active pendant un jour férié à déterminer en vue de financer un chantier social jugé essentiel comme celui des personnes âgées démunies. Cela dit, d’aucuns peuvent objecter que les jours fériés sont une manne pour l’activité touristique dont elle fait tourner les hôtels, restaurants et autres prestataires de services. Mais le trop-plein de fêtes est une perte sèche pour bien d’autres secteurs où la productivité-, surtout si elle est accompagnée d’une efficacité au travail- est un facteur essentiel de compétitivité tout en induisant une amélioration du niveau de vie. La faute à qui? A la culture ambiante, à cette mentalité bien ancrée que les gouvernements qui se sont succédé n’ont pas fait grand-chose pour mettre la productivité et l’efficience au travail par l’amélioration du niveau du capital humain au cœur des priorités. En tout cas, cette inflation de fêtes ne valide pas la volonté affichée officiellement de faire entrer le pays dans le club des pays développés. Et ce n’est pas non plus avec autant de jours fériés que le Maroc, scotché à un taux de croissance anémique,  parviendra à réaliser un taux  de croissance à deux chiffres sur plusieurs années, condition sine qua non pour lutter contre le chômage des jeunes et créer suffisamment de richesses et en faire profiter le plus grand nombre. Une telle performance mérite en revanche d’être fêtée comme il se doit.

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