Au Maroc, nous avons toujours le chic de consommer ce que le pays ne produit pas et qui de surcroît  coûte très cher alors qu’il y a des articles manufacturés en pagaille que l’on peut usiner sur place. Pour peu que les décideurs arrêtent leur fabrique à parlotte roulant autant aux effets d’annonce qu’à l’autosatisfaction, et  se donnent les moyens pour y arriver.

Prenez aussi l’exemple  l’énergie, pétrole et gaz notamment, dont la facture est de plus en plus lourde, pouvant atteindre à la fin de cette année les 100 milliards de DH en raison du renchérissement du prix des combustibles pour les raisons que l’on sait. A ce rythme, l’indépendance énergétique nationale s’apparente à un vœu pieux ou un beau mirage en plein désert. La faute à qui ? Certainement à personne !      

Pays non-producteur d’hydrocarbures doté en ressources solaires et éoliennes non négligeables, le Royaume a pris conscience de sa vulnérabilité à cause de sa dépendance très forte des énergies fossiles, d’où l’adoption dès 2009, sous l’impulsion royale, de la stratégie énergétique nationale. Objectif proclamé : augmenter la part des énergies renouvelables dans le mix énergétique qui dépend encore largement des sources fossiles tout en érigeant l’efficacité énergétique en priorité nationale : réaliser une économie de 15% de sa consommation énergétique à l'horizon 2030.

La guerre en Ukraine et l’envolée spectaculaire  des prix du pétrole et du gaz qu’elle a provoquée a eu comme conséquence directe de faire flamber les prix à la pompe au grand malheur des automobilistes, d’exercer une pression très forte sur la caisse de compensation et de menacer l’équilibre financier de l’ONEE… Si ce conflit ravageur, qui se déroule à plusieurs milliers de kilomètres du Maroc, a un quelconque mérite c’est d’avoir montré le principal défaut de la gouvernance nationale : l’incapacité de se projeter résolument  dans l’avenir par l’accélération  du rythme d’exécution des hautes résolutions du souverain (investissements dans les énergies renouvelables et priorisation de l’efficacité énergétique), qui dénotent un esprit visionnaire remarquable. Quand bien même le chemin aura été balisé, les objectifs tracés et les moyens financiers nécessaires mobilisés, le moteur de l’initiative, censé être incarné par l’exécutif et les collectivités territoriales pour concrétiser la vision royale, connaît des ratés…  

Notre ministre de la Transition énergétique  n’a même pas été capable de faire de la décarbonation un élément de communication politique et tenir un discours sur les missions de son département a fortiori se mobiliser en faveur de l’entrée dans les mœurs marocaines du véhicule électrique, de la trottinette, de la décarbonation de l’industrie ou la promotion de l’économie circulaire ?

A quoi en effet sert l’efficacité énergétique si elle ne se traduit pas concrètement dans la réalité de tous les jours ? La réalité de tous les jours c’est d’abord la mobilité (véhicules particuliers, transport en commun, ferroviaire…), le bâtiment (travaux d’isolation  du toit, des murs, pompe à chaleur…) et le secteur industriel dont  la décarbonation, qui offre de nouvelles opportunités intéressantes, est devenue une nécessité (une taxe carbone sera imposée aux frontières européennes sur les produits importés des pays tiers).

Parmi les missions de l’Agence marocaine pour l’efficacité énergétique (Amee) dont l’excellent travail en termes de réglementation et de labellisation  gagne toutefois à mieux se faire connaître figure l’implémentation de la politique gouvernementale visant justement la réduction de la dépendance des énergies fossiles via la promotion de l’efficacité énergétique. Mais le dynamisme de l’agence dirigée par Saïd Mouline se heurte à l’absence d’une «politique gouvernementale» volontariste en vue d’encourager par un train de mesures tangibles et d’incitations diverses le recours des citoyens et des acteurs économiques aux énergies propres. Il faut reconnaître que l’exécutif est à la pointe dans ces domaines mais seulement au niveau de l’intitulé du ministère dédié à la Transition énergétique et au Développement durable. Sans plus. Comment peut-il en être autrement puisque sa titulaire, qui s’est vendue comme une experte mondiale en matière d’énergie, ne s'est exprimée jusqu’ici que  sur le dossier du passé  de la Samir, à l’occasion de la polémique sur la flambée des prix à la pompe, pour soutenir sans transition la chose et son contraire en l’espace de quelques semaines. Notre ministre n’a même pas été capable de faire de la décarbonation un élément de communication politique  et tenir un discours sur les missions de son département a fortiori se mobiliser en faveur de l’entrée dans les mœurs  marocaines du véhicule électrique, de la trottinette, de la décarbonation de l’industrie ou la promotion de l’économie circulaire ?

Pourquoi se casser la tête pour agir dès maintenant  puisque la fin de la vente des véhicules thermiques (essence et diesel) a été annoncée par l’Union européenne à partir de 2035. Au Maroc, où les ministres ont pris l’habitude de gérer des stratégies sectorielles Powerpoint avec des délais dépassant de très loin la durée de leur mandat, rien ne presse franchement ! 2035 c’est encore loin…On a encore du temps et la meilleure action publique à entreprendre c’est d’attendre d’être mis devant le fait accompli par les autres pour que la mobilité électrique et autres piliers de l’efficacité énergétique s’imposent d’eux-mêmes… Vive la force de l’inertie ! La vraie énergie d’avenir au Maroc !

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