Israël emmuré dans son mode de scrutin.

À trop vouloir laisser s’exprimer toutes les sensibilités de la société finalement personne ne s’exprime...

À trop vouloir laisser s’exprimer toutes les sensibilités de la société finalement personne ne s’exprime. C’est un peu ce qui arrive en Israël. Il y a10 jours, le mardi 23 mars, les Israéliens votaient pour la quatrième fois en deux ans. Du jamais vu! En cause : le système de la proportionnelle intégrale qui, pour le politologue Philippe Velilla, « a atteint ses limites. Avec une seule circonscription sur l'ensemble du pays, elle encourage le vote pour les petits partis. Cela favorise le clientélisme, la dispersion des voix et donc l'instabilité gouvernementale. L'impossibilité de former une majorité... »

Évidemment cela Benyamin Netanyahou le savait sinon il n’aurait pas poussé la Knesset à s’auto-dissoudre le 22 décembre 2020 après un 3e blocage politique faute de majorité claire. Pourquoi a-t-il donc provoqué de nouvelles élections législatives sachant que cela non seulement coûte cher en temps et en argent mais fatigue les électeurs? En fait l’agenda de Netanyahou est différent de celui des députés et du peuple. Le chef du Likoud traîne un chapelet de casseroles sonnantes et trébuchantes qui risque de mettre fin brutalement à son parcours politique.

L’audition des témoins dans son procès qui commence ce 5 avril où il est inculpé pour corruption dans trois dossiers distincts, commence ce 5 avril devant le tribunal de district de Jérusalem. Même si le concerné et ses sympathisants clament à cor et à cri qu’il est innocent et que ces affaires de corruption et que ces accusations sont le fait d’une cabale montée par la gauche radicale, Bibi a des soucis à se faire. C’est pourquoi il essaye de jouer sur plusieurs cordes : d’un côté gagner du temps avec le jeu des élections sans cesse refaites en attendant notamment la fin du mandat du procureur général israélien Avichai Mandelblit qu’il a nommé en 2016 et qui pour le remercier a décidé de l’inculper le 21 novembre 2019 pour corruption, fraude et abus de confiance dans l'affaire 4000. D’un autre côté, parier sur la fatigue des électeurs non religieux qui votent généralement contre lui. En effet une forte abstention des votants de Gauche et des Laïcs lui serait bénéfique ; car les likudniks et les ultraorthodoxes, eux, ne se lasseront jamais de voter pour lui et pour les partis qui le soutiennent. Entre les deux côtés, bien sûr, Netanyahou espérait que les accords d’Abraham signés avec certains pays arabes séduiraient la Gauche libérale ne serait-ce que parce qu’ils injecteraient des milliards de pétrodollars dans les caisses de l’État hébreu.

Finalement, tout cela s’est révélé n’être qu’un nuage d’été. Une 4e élection pour rien et une cinquième est au programme ! Les partisans de Netanyahou disposent de 52 sièges tandis que les partis qui lui sont opposés en ont 57. Si on ajoute les faiseurs de rois : les pro-Bibi ont 59 mandats en comptant les 7 voix du parti sioniste religieux Yamina et les anti-Natanyahou en ont 61 en ajoutant les 4 sièges du parti arabe Raam (Liste arabe unifiée) de Mansour Abbas. Arithmétiquement le camp opposé au chef du Likoud peut former un gouvernement, étant donné que le minimum pour le faire est de disposer d’une majorité de 61 sièges sur les 120 que compte la Knesset. Mais ce ne sera pas chose facile de concilier les laïcs et les sionistes anti-Netanyahou avec le parti islamiste de Mansour Abbas. Idem du camp pro-Bibi : impossible de faire cohabiter les ultras de Yamina et avec  les islamistes arabes de Raam. Par ailleurs si Netanyahou parvient à former un gouvernement minoritaire (Raam accepte de soutenir Natanyahou sans avoir de portefeuille au sein d’un cabinet) reste la question de savoir qui va siéger au parlement israélien, et surtout qui va en être le responsable. Une perspective qui suscite de nombreux débats politiques. On en est là et las.

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