Sainte-Sophie d’Istanbul.

L’affaire de la reconversion de la basilique-musée Sainte-Sophie d’Istanbul en « mosquée » émeut le monde occidental...

L’affaire de la reconversion de la basilique-musée Sainte-Sophie d’Istanbul en « mosquée » émeut le monde occidental et l’attriste. Si l’on comprend l’indignation et la déploration exprimées par des dirigeants de pays dont le christianisme est religion d’État comme la Grèce ou par le chef de l’église catholique,  le pape François, on est très étonné par celles exprimées par des responsables de pays se disant champions de la laïcité et fanas du principe de séparation de l’Église et de l’État comme la France. La classe politique de France que des incendies de la cathédrale Notre-Dame de Paris, le lundi 15 avril 2019, et celui moins grave et plus récent de Saint-Pierre-et-Saint-Paul de Nantes, samedi dernier, ont mis en émoi et plongé dans une profonde tristesse. Un chagrin plus fort que celui provoqué par la pandémie du Covid-19 ! Le gouvernement français « déplore » les décisions des autorités turques de transformer l'ex-basilique Sainte-Sophie d'Istanbul de musée en mosquée, a déclaré vendredi le ministre des Affaires étrangères Jean-Yves Le Drian.

« La France déplore la décision du Conseil d'État turc de modifier le statut de musée de Sainte-Sophie et le décret du Président Erdogan la plaçant sous l'autorité de la direction des affaires religieuses. Ces décisions remettent en cause l'un des actes les plus symboliques de la Turquie moderne et laïque », a déclaré le ministre, selon un communiqué. « L'intégrité de ce joyau religieux, architectural et historique, symbole de la liberté de religion, de tolérance et de diversité, inscrit au patrimoine mondial de l'UNESCO, doit être préservé », a ajouté le ministre ! Une réaction épidermique dont la fermeté et l’immédiateté cachent des considérations politiques et culturelles (Voir encadré 1) qui débordent le cadre strict de la question de la simple re-transformation d’une basilique-musée en lieu de prière ouvert aux musulmans.

A travers cette initiative des autorités turques de reconvertir Sainte-Sophie d en lieu de culte musulman (Voir encadré 2) c’est le président islamiste Erdogan et son régime islamiste qui sont visés. La guéguerre entre Paris et Ankara sur le terrain libyen n’est plus un secret comme l’est le refus de tous les gouvernements français, de gauche comme de droite, de l’entrée de la Turquie dans l’Union européenne malgré tous ses efforts de mise à niveau pour y arriver. En réalité cette peur européenne de la Turquie dépasse le cadre islamiste du régime au pouvoir à Ankara depuis 2002.

Même l’Allemagne, pourtant gouvernée par les démocrates chrétiens et abritant une forte communauté turque et turco-kurde, a peur de la Turquie et de son parti AKP qui se définit comme islamo-démocrate, autrement dit  l’image par homothétie de la CDU (Union chrétienne-démocrate d'Allemagne). En fait que pensent les avocats de Sainte-Sophie  de la transformation de la grande mosquée andalouse de Cordoue en Cathédrale surtout que l'Église catholique a acquis cette mosquée-cathédrale dans le plus grand secret et pour une somme dérisoire sans que cela ne fasse autant de boucan ?

Lépante, le fantôme du passé

La bataille de Lépante est une bataille navale qui s'est déroulée le 7 octobre 1571 dans le golfe de Patras, sur la côte occidentale de la Grèce, à proximité de Naupacte - appelée alors Lépante -, dans le contexte de la Quatrième Guerre vénéto-ottomane. La puissante marine ottomane y affronta une flotte chrétienne comprenant des escadres vénitiennes et espagnoles renforcées de galères génoises, pontificales, maltaises et savoyardes, le tout réuni sous le nom de Sainte-Ligue à l'initiative du pape Pie V. La bataille se conclut par une défaite pour les Ottomans qui y perdirent la plus grande partie de leurs vaisseaux et plus de 20 000 hommes et 200 bateaux. L'événement eut un retentissement considérable en Europe car, plus encore que la défaite des janissaires lors du Grand Siège de Malte de 1565, il sonna comme un coup d'arrêt porté à l'expansionnisme ottoman. C’est d’ailleurs en souvenir de cette victoire que fut instituée la fête de Notre-Dame de la Victoire, puis fête du Saint-Rosaire à partir de 1573. Wikipedia.

Lieu de culte (Masjid) n’est pas mosquée (Jamaa)

L'ancienne basilique-mosquée a été transformée en musée par le laïc Mustafa Kemal Atatürk alors arrivé à la tête de la Turquie en 1934. Le conseil d'État a annulé cette décision vendredi 10 juillet, expliquant dans ses attendus que selon les actes de propriété au nom de la Fondation Mehmet Fatih, du nom du sultan ottoman qui a conquis Constantinople, Sainte-Sophie était inscrite comme une mosquée et que cette qualification ne pouvait être modifiée. Elle est une propriété de l’État turc. De même la décision d’Erdogan, basée sur la décision de justice de son pays, d’ouvrir cet édifice aux fidèles musulmans pour y accomplir leurs prières n’en fait pas une mosquée à proprement parler comme le pensent à tort beaucoup de médias arabes et occidentaux. L’ex basilique-musée a été convertie en masjid (salle ou lieu de prière) et non pas en Jamaa (mosquée) qui abrite des activités qu’un simple masjid ne peut pas abriter tels que les cours d'arabe et de Coran, les prières rogatoires, les prières des fêtes du sacrifice ou de El Fitr sans oublier le fameux « Minbar » (tribune), l’équivalent islamique du « cathèdre » qui fait d’une simple église une cathédrale ; et ce même si le président Erdogan y a présidé vendredi 14 juillet la première grande prière du Vendredi depuis 86 ans.

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