Sénégal : Affrontements meurtriers entre manifestants et policiers

Des partisans d’Ousmane Sonko affrontent les forces de sécurité, à Dakar, le 2 juin 2023. REUTERS/Zohra Bensemra.

Une autre personne a été tuée au Sénégal vendredi, alors que la police et les manifestants s’affrontaient pour la deuxième journée depuis que la condamnation de l’opposant Ousmane Sonko a déclenché des violences parmi les plus meurtrières de mémoire récente. Neuf personnes ont trouvé la mort dans des affrontements entre la police et les partisans de M. Sonko, jeudi, après sa condamnation à deux ans de prison pour corruption de jeunes. L’opposition estime que le verdict, qui pourrait empêcher Sonko de se présenter aux élections de l’année prochaine, est motivé par des considérations politiques. Des foules de manifestants cagoulés, certains brandissant des pelles, ont mis le feu à des pneus et à des débris, se heurtant à la police dans divers quartiers de la capitale, Dakar. La foule a attaqué des supermarchés, des magasins, des banques, des postes de police et des réseaux de transport public. Des scènes similaires ont été rapportées dans d’autres parties du pays vendredi. Le porte-parole du ministère de l’Intérieur, Maham Ka, a déclaré qu’une autre personne avait été tuée dans la ville de Cap Skirring, dans le sud du pays, où les manifestants ont pris pour cible une gendarmerie, ce qui porte le nombre de morts à 10.

La police anti-émeute et les soldats déployés pour renforcer la sécurité ont réprimé les manifestations à l’aide de gaz lacrymogènes, qui se sont répandus dans Dakar vendredi soir alors que de fortes détonations retentissaient dans plusieurs quartiers. M. Ka a déclaré à la radio et à la télévision d’État que la situation était désormais essentiellement sous contrôle et que les quelques « incursions » restantes étaient gérées. « Si les manifestations étaient restées pacifiques, il n’y aurait pas de problème », a-t-il déclaré, qualifiant les protestations de « violence gratuite » et félicitant les forces de sécurité pour leur action. Plusieurs médias sociaux et plateformes de messagerie ont été restreints afin de limiter les communications en ligne. Les émeutes de jeudi et vendredi sont le dernier épisode en date de plusieurs mois de violence au Sénégal, longtemps considéré comme l’une des démocraties les plus solides d’Afrique de l’Ouest. Elles ont été déclenchées par le procès de M. Sonko et par la crainte que le président Macky Sall ne tente de contourner la limite de deux mandats et de se représenter en février. M. Sall n’a ni confirmé ni infirmé cette hypothèse. Les Nations unies, l’Union africaine et le principal bloc régional d’Afrique de l’Ouest ont condamné les violences. La France a appelé à la retenue et au dialogue pour résoudre la crise. Amnesty International a demandé au gouvernement d’enquêter sur les décès survenus jeudi et de s’abstenir de tout recours excessif à la force. Samedi, le nombre de tués à atteint 16 et la tension commença à retomber progressivement.