Saaeddine Al Othmani, premier ministre
Saliha Toumi
27.5.2021 2:01

Une équipe du Canard a été accueillie par le Premier ministre  Saaeddine Al Othmani dans son bureau à la primature, où aucun dossier n’est posé.

Vous venez de vous attirer les foudres du représentant israélien au Maroc à cause de votre texte de félicitation adressé au Hamas… Auriez-vous oublié que vous avez signé au nom du Maroc les fameux accords d’Abraham de normalisation avec l’État hébreu ?

Je n’ai rien oublié. Il fallait marquer ma solidarité avec le Hamas, qualifié d’organisation terroriste par le diplomate israélien, pour montrer que le PJD est toujours aux côtés des Palestiniens, ne serait-ce ce que par les paroles…


Alors, Ba Saad, comment envisagez-vous l’avenir ?

Mon avenir personnel est assuré. Plus que quelques mois pour que je rejoigne le club islamiste des ex-premiers ministres grassement payés pour services non rendus. Quant à l’avenir du Maroc, je suis désolé de vous dire que je n’ai pas assez d’éléments de réponse pour me prononcer.


Et l’avenir du PJD ?

Franchement, le PJD est mal barré, bien parti, pour revenir à l’opposition où il est assuré de végéter pendant plusieurs décennies. D’où l’agitation de certains dirigeants du parti qui commencent à craindre pour leurs acquis. Pour ma part, je plains les militants qui avec des années d’attente au compteur ont très peu de chance de goûter de sitôt aux délices de l’inaction au pouvoir…


Mais encore ?

L’inaction est mon mot préféré dont j’ai découvert toute la plénitude. Plus tu es engagé dans l’inaction, moins tu stresses et plus tu regardes les choses avec sérénité et tu rajeunis.  Cela ne sert à rien donc de sacrifier sa vie à agir surtout dans un contexte d’adversité.


Pour vous, les prochaines législatives marqueront la fin d PJD au pouvoir…

Absolument. Le tour du RNI est venu pour conduire les affaires du pays où, nous islamistes, nous avons montré une incompétence glaçante et fini par perdre notre virginité politique à force de flirter avec plusieurs partenaires.


Allez-vous vous refaire une nouvelle virginité en retournant dans l’opposition ?

Une fois qu’on a perdu sa virginité naturelle, il est impossible de la récupérer. Dans le cas des islamistes, la perte de virginité a été aggravée par une série de viols, le rétablissement des relations du Maroc avec Israël, la légalisation du cannabis à usage médical, le quotient électoral et bien d’autres joyeusetés. Tout cela a contribué à notre démasquage grand public et à la perte de notre popularité construite à coups de paniers de la charité politique.


Mais ne prenez-vous pas personnellement un grand risque en vous représentant à Mohammedia ?

Vous savez, un homme comme moi, devenu malgré lui le guignol politique préféré des Marocains, n’a rien à perdre.  Il faut bien que je montre que je suis un homme du passé…

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