Abdellah Chankou
17/11/2021 23:59

Les embouteillages à Casablanca sont tels que la circulation y est toujours infernale. Devant le trop-plein de voitures bruyantes,...

Les embouteillages à Casablanca sont tels que la circulation y est toujours infernale. Devant le trop-plein de voitures bruyantes, d’autobus envahissants, de camions ronronnants, de taxis imprévisibles, de deux roues suicidaires et de charrettes dangereuses, les voies de circulation existantes sont devenues depuis longtemps trop petites pour permettre un trafic ordonné, serein et fluide. Mais les responsables de la ville ont préféré agir résolument dans le sens inverse en organisant encore plus le rétrécissement des principales artères et boulevards de la ville au profit du tramway et du nouveau venu, le Busway avec ses deux lignes en cours d’achèvement. La situation aurait été certainement moins critique si les élus avaient fait le choix judicieux, comme c’est le cas ailleurs, de ne pas les faire circuler en « site propre » afin de permettre aux autres véhicules d’emprunter la voie du Tram et du Busway. L’isolement pour des raisons de sécurité de la plate-forme de ces deux moyens de transport collectifs par rapport à la circulation générale est une grosse erreur qui condamne la circulation à la congestion permanente en l’aggravant au fil du temps. Or, les patrons de la ville auraient dû comprendre au lieu de s'amuser à multiplier les impasses urbaines que la cohabitation de toutes les mobilités, si elle peut être difficile au début, finit par s’imposer.  « Ne circulez plus, il n’y a rien à voir ni à prévoir ! ». La moitié de la chaussée étant bouffée par ces deux seigneurs de la circulation, les autres véhicules roulent presque les uns derrière les autres sur une seule file rétrécie dans un décor chaotique. En cas d’accident, nulle échappatoire. Le blocage est total et libérer la voie devient mission impossible. Le tramway en site propre de Casablanca a fait également une grande victime collatérale, les commerces bordant les deux côtés de sa voie de circulation en raison de l’interdiction de stationner imposée justement par la réduction de la chaussée. Au lieu de faire marcher le business, le Tram marocain le tue sans contribuer, autre énorme paradoxe, au renouveau commercial du centre-ville, en proie depuis longtemps à un délabrement pour le moins incompréhensible. L’erreur originelle vient sans doute du fait que le Tram a été conçu juste comme un simple moyen de transport qui déplace la foule des usagers d’un point à un autre et non comme un outil d’aménagement urbain tourné vers les objectifs de requalification urbaine et planifiés dans la rationalité  par les politiques de la ville.

L’effet tram sur la décongestion de la circulation, contrairement aux promesses des responsables à l’époque, est nul ou presque puisqu’il est utilisé principalement par les citoyens non motorisés. La raison de cet échec tient à l’absence de correspondance Tram-Bus permettant aux usagers de poursuivre leurs trajets au-delà des grands axes.

« Automobilistes, débrouillez-vous!, semblent leur lancer des élus goguenards ». « Le Tram et le Busway c’est notre contrat du siècle mais ils sont devenus votre problème, voire votre cauchemar diurne ». En voilà une drôle de gouvernance locale qui roule à l’on sait quelle carburant de génie puisqu’elle œuvre non pas pour atténuer le caractère invivable de la circulation urbaine mais pour la rendre encore plus cauchemardesque.Tout à leur volonté de résoudre la crise de mobilité complexe qui frappe depuis des décennies une agglomération en proie au surpeuplement, les élus se sont rabattus sur un transport en commun qui n’a rien de commun, créant plus de problèmes qu’il n’en résout. En cause, l’absence  dans leur vision -si tant qu’ils en ont vraiment -  de la voiture, reléguée bizarrement au second  plan alors que celle-ci devient de plus en plus dominante dans l’espace public et contribue à sa saturation plus que de raison, faute justement d’alternative tendant à changer la hiérarchie  des modes de déplacement. De telle sorte que les automobilistes soient encouragés à laisser leur véhicule et prendre le Tram et le Busway.  Tel n’a pas été le cas. L’effet tram sur la décongestion de la circulation, contrairement aux promesses des responsables à l’époque, est nul ou presque puisqu’il est utilisé principalement par les citoyens non motorisés. La raison de cet échec tient à l’absence de correspondance Tram-Bus permettant aux usagers de poursuivre leurs trajets au-delà des grands axes. La mise en place de l’offre du Busway est censée remédier à cette grosse lacune. Mais dans le contexte social et culturel de Casablanca marqué entre autres par l’absence de parkings et de parkings-relais, ce n’est pas sûr que la combinaison tram-busway détrône l’automobile dont le parc se développe d’année en année avec tout ce que cette croissance implique comme aggravation de la saturation du trafic et de la pollution.  

Pour pousser les habitants à privilégier d’autres modes de transport comme le vélo et les transports en commun, il faut des élus capables de mettre Casablanca en ligne avec les enjeux de demain qui sont écologiques et porteurs d’une meilleure vie en ville. Sur ce plan, force est de constater qu’on est loin du compte. Certes, le Tram et le Busway sont réputés bas-carbone. Mais les édiles actuels carburent pour d’autres enjeux qui ne sont pas conformes en termes d’offre de ville vivable avec les attentes de la population.

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