Khouribga, une ville française... (12)

Beurgeois gentlemen
18/9/2020 13:20
Khouribga, une ville  française... (12)

A Mnina où quelques familles vivent regroupées autour d’un point d’eau au nord de l’actuelle ville de Khouribga,...

A Mnina où quelques familles vivent regroupées autour d’un point d’eau au nord de l’actuelle ville de Khouribga, le seigneur de la bourgade repense à son récent séjour à Boujad. Les marabouts reçurent bien certains voyageurs Juifs qu’ils prirent pour des espions. Un des plus célèbres fut le vicomte Charles de Foucauld né en 1858 à Strasbourg. Il commença sa vie comme officier de cavalerie de l'armée française, puis devient espion, ensuite prêtre catholique avant de finir ermite dans le désert à Tamanrasset. Il y sera assassiné en 1916.

A Alger, le vicomte de Foucauld rencontre le rabbin Mardochée Abi Serour qui lui propose de devenir son guide et lui dit de se déguiser en Juif afin de mieux passer inaperçu au Maroc, pays interdit aux N’ssara (Nazaréens) et peuplé en majorité de tribus du bled Siba échappant au contrôle du sultan Hassan 1er. Pour que la composition soit juste, le vicomte de Foucauld vit dans le quartier juif d'Alger, laisse pousser sa barbe, ses papillotes, adopte le costume traditionnel juif, acquiert les manières juives. A cette occasion, il se rend compte par lui-même des vexations à l'égard des Juifs, venant tant des Musulmans que des Français établis en Algérie depuis 1830. La réussite de son espionnage du Maroc est due en partie à l'aide du rabbin Mardochée Abi Serour qui n'en a tiré pratiquement aucune reconnaissance. Durant douze mois, sous le règne du sultan Hassan 1er, Charles de Foucauld parcourt le Maroc, muni d'un cahier de cinq centimètres carrés et d'un crayon long de deux centimètres. En vue de recueillir les renseignements qui l'intéressaient, sans éveiller les soupçons. L'ouvrage est ensuite rédigé au cours de l'année 1885, soit l'année qui précède sa conversion religieuse. Il a été édité à Paris en 1888. Écrit dans un style très sobre, ce journal est une mine d'informations ethnologiques, géographiques, linguistiques et historiques. Cet ouvrage est réputé avoir été d'une grande utilité pour la conquête du Maroc et l'établissement du protectorat français.

Charles de Foucauld est bien accueilli par le Seigneur de Boujad, lointain descendant du Calife Omar, l’un des proches compagnons du prophète Mahomet. Le vicomte est agréablement surpris par l’excessive amabilité du Seigneur de Boujad qui s’efforce de le mettre en confiance et de le faire parler. Le seigneur de Boujad veut être ami avec le vicomte de Foucauld. Il lui répète qu’il voudrait aller à Alger, et de là sur le continent des N’ssara: serait-ce possible ? – Rien n’est plus facile, lui dit le vicomte de Foucauld, le ministre de France à Tanger le fera parvenir à Alger, où il sera tout à son service. Et lui-même, amènerait-il un Nazaréen à Boujad ? II ne demanderait pas mieux, pourvu que le Nazaréen fût déguisé en Musulman ou en Juif et que le sultan ne sût rien ; il faudrait que la chose se négociât en secret entre lui et le ministre de France. En ce cas, ajoute Mardochée, les autorités françaises lui feront le meilleur accueil, car elles seront aises d’envoyer des Français reconnaître Boujad que n’a jamais vu aucun Nazaréen. Le lendemain matin, nouvelle visite du Seigneur de Boujad, l’entretien devient tout à fait intime : il s’engage, dans une lettre au ministre de France, à accueillir et protéger tout Français dans sa ville et il est prêt à faire une visite au même fonctionnaire pour l’assurer de sa bonne volonté envers la France. Le même jour le vicomte de Foucauld et le rabbin Mardochée sont reçus dans une belle salle où huit marabouts de la famille du seigneur de Boujad sont assis autour de lui. Des petites négresses âgées d’à peine dix ans leur apportent thé, pâtisseries, beurre, œufs, café, amandes, raisins, figues sur des plateaux éblouissants. Le seigneur s’excuse de n’avoir ni couteaux, ni fourchettes. A l’opposé, il constate la méfiance des Juifs de Boujad qui surveillent ses moindres démarches, mettent leurs nez dans le calepin du vicomte de Foucauld dès qu’il veut écrire. Ainsi les Israélites continuent à espionner l’espion Nazaréen pour le compte du Seigneur de Boujad. (A suivre)

Les plus lus
CANETON FOUINEURLa Covid-19 est-elle devenue une simple grippe ?

Contrairement en Europe où il est toujours en pleine expansion, au Maroc la Covid-19 recule de jour en jour, perdant...

La rédaction
11/2/2021
CANETON FOUINEURLe Maroc parie sur la justice

L’Etat marocain a officiellement porté plainte contre 1xBet, chargé de mission au sein de la Marocaine des Jeux et des Sports (MDJS)....

CANETON FOUINEURL’OFPPT remplit-il son office ?

Malgré ses effectifs pléthoriques estimés à près de 11.000 collaborateurs à travers tout le pays, l’OFPPT de Loubna Tricha fait appel...

19/5/2022
CANETON FOUINEURLe cri d’alarme des soignants

L’hôpital de campagne de Casablanca n’est pas équipé pour prendre en charge correctement les malades du Covid...

Ahmed Zoubaïr
18/3/2021
CANETON FOUINEURTrès cher fret maritime

Depuis quelques mois, les tarifs du fret maritime connaissent une hausse constante. Le transport d’un conteneur à 20 pieds et à 40...

La rédaction
3/12/2020
CANETON FOUINEURLe Maroc face à la fureur des flots...

En laissant mourir sa flotte maritime, le Royaume a perdu un levier hautement stratégique dans les échanges mondiaux de marchandises...

Jamil Manar
8/4/2021
CANETON FOUINEURLe sacre du grand "footoir "

Entre insécurité, désordre et violences, regarder les matchs chauds qu’abrite le stade Mohammed V s’apparente à une montée au front...

4/5/2023
CANETON FOUINEURLa Covid-19 s’approche de Benkirane

Après les ministres Amara et Rabbah, des élus de Marrakech et la députée de Hay El Hassani Amina Maealainine...

La rédaction
29/10/2020